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Les perspectives 2022 commentées par Christophe Cherry

Rédigé par Fabienne ALLAINGUILLAUME | 07 janv. 2022

Si leurs perspectives demeurent favorables en ce début d'année 2022, les incertitudes autour de l'inflation, des tensions logistiques et de la situation sanitaire incitent à la prudence.

En 2021, les entreprises françaises ont bien résisté aux restrictions sanitaires du premier semestre et nettement tiré parti du rebond du troisième trimestre. 

Au troisième trimestre 2021, l’économie française a retrouvé le niveau qui était le sien à fin 2019. Cette performance n’est pas anodine au vu de la situation qui prévalait, à cette même date, dans le reste de l’Europe occidentale: tandis que les PIB allemand et italien restaient inférieurs d’un point à leurs seuils pré-pandémiques, le PIB espagnol évoluait péniblement, quant à lui, à plus de six points de l’objectif précité, selon l’Insee. Après un deuxième trimestre affecté par les restrictions sanitaires, le troisième trimestre 2021 a été marqué, en France, par un net rebond de l’activité tiré par la demande intérieure et, plus spécifiquement, par la consommation des ménages. Au cours de l’année écoulée, la croissance française devrait s’établir in fine autour de 6,7%, selon les estimations de la Banque de France et de l’Insee. A titre comparatif, celle de l’Allemagne pourrait légèrement dépasser les 2,5%, d’après les dernières prévisions de l’Ifo. 

"L’activité française a davantage souffert de la pandémie que celle de son voisin allemand, il n’est donc pas surprenant que son rattrapage soit mécaniquement plus net." commente Christophe Cherry. 

Des disparités plus ou moins prononcées

En 2021, les entreprises françaises ont généralement bien encaissé le choc du troisième confinement et profité de la reprise subséquente. Durant le premier semestre, le chiffre d’affaires cumulé du CAC 40 a progressé de 21% sur un an en données comparables, et presque retrouvé son niveau du premier semestre 2019, selon PwC. Celui du SBF 120 sur les neuf premiers mois de l’année, de 1250 milliards d’euros, s’est apprécié pour sa part de 10% sur deux ans. Quant aux TPE-PME, elles anticipent une hausse de 7% de leur chiffre d’affaires sur l’ensemble de l’année écoulée, selon la 74e enquête de conjoncture PME de Bpifrance et de Rexecode.

"La relance de l’activité, forte et rapide, a profité au BTP ainsi qu’à la plupart des secteurs industriels. Même l’aéronautique, fortement touché par la pandémie, a rebondi grâce au renouvellement des flottes des compagnies aériennes. Nous restons néanmoins attentifs à l’évolution du secteur automobile, en pleine transformation de son offre et confronté à une baisse très nette de la demande." indique Christophe Cherry

Les sociétés non financières françaises n’ont pas seulement enregistré une croissance de leurs revenus moyens en 2021. Elles ont également préservé leur résultat d’exploitation. Leur taux de marge s’est établi au niveau historiquement élevé de 35,6 °/o au premier semestre, selon Rexecode, alors même que le ratio constaté en 2019, non corrigé du CICE, avait atteint 33,4 °/o, d’après la Banque de France. Une excellente performance soutenue par la montée en charge du fonds de solidarité à partir de décembre 2020, par la réduction des impôts de production et par un rebond de la valeur ajoutée plus fort que celui des rémunérations versées. « Le taux de marge a logiquement diminué au troisième trimestre en raison de la levée d’un certain nombre de mesures de soutien à l’activité mises en place par l’exécutif en 2020, relève Bruno de Moura Femandes, économiste pour l’Europe de l’Ouest chez Coface. De 32,9% à fin septembre, il restait toutefois plus élevé à cette date que celui relevé en moyenne sur la période 2015-2018, de32°/o. »

Une « bosse » inflationniste

Jusqu’à fin novembre, les entreprises sont parvenues à ne répercuter que modérément ce renchérissement sur leurs prix. Entre septembre et novembre derniers, les prix à la consommation des produits manufacturés ont ainsi augmenté en moyenne de 0,8 °/o sur un an, selon l’Insee, un chiffre en ligne avec ceux constatés depuis le redémarrage de l’été 2020. La tendance s’est néanmoins affirmée au mois de décembre, au cours duquel cet agrégat a crû de 1,2%. L’année 2022 s’ouvre par conséquent sur une interrogation majeure : jusqu’à quel point la politique prix des entreprises est-elle susceptible de doper une inflation jusqu’alors essentiellement tirée par l’augmentation des prix de l’énergie ?

Pour l’heure, le scénario de référence anticipe, en France, une progression mesurée des prix des produits manufacturés et des services marchands accompagnée d’un ralentissement net de la hausse des prix de l’énergie au cours du premier semestre.

Plus prudente, la Banque de France table de son côté sur ce même rééquilibrage « d’ici fin 2022 ». De quoi accréditer, là encore, la thèse d’une « bosse » alimentée par des facteurs essentiellement transitoires.

Egalement privilégié par la Banque centrale européenne pour la zone euro (où les prix à la consommation ont augmenté de 5% en décembre, un record depuis le commencement des relevés inflationnistes dans l’espace communautaire en 1997), ce scénario ne laisse pas entrevoir, pour l’heure, de durcissement imminent de sa politique monétaire. En décembre dernier, l’institution francfortoise a d’ailleurs maintenu ses taux directeurs à leur plus bas historique, tout en annonçant une réduction graduelle du rythme de ses rachats d’actifs dans un contexte de résurgence pandémique. Il n’empêche qu’un certain nombre d’observateurs estiment que la persistance d’une hausse des prix de l’énergie et de tensions dans les chaînes logistiques pourrait contraindre la BCE à infléchir graduellement sa politique... Sans parler bien entendu d’un virage plus offensif de la Fed, à l’étude depuis plusieurs semaines en raison de la vigueur de la reprise américaine.