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La Coupe du monde pour relancer l’activité du Qatar ?

Rédigé par Fabienne ALLAINGUILLAUME | 09 déc. 2022

Avec les investissements et des infrastructures de la Coupe du monde, l'ambitieux État du Golfe vise à diversifier son économie, qui dépend du pétrole et du gaz.

Avec ses 220 milliards de dollars, l'actuelle Coupe du monde de la FIFA au Qatar est la plus chère jamais organisée. À titre de comparaison, l'Allemagne a dépensé environ 4,3 milliards de dollars pour accueillir la compétition en 2006.

Mais, si le Qatar a dépensé une somme considérable, la vision du pays sur ses dépenses est plus positive. Seule une petite partie de cette somme - moins de 10 milliards de dollars - a été consacrée à la construction des stades. Le reste a été investi dans des infrastructures qui apporteront des avantages économiques à l'État du Golfe bien après la fin du tournoi.

« Tout cela fait partie de l’initiative « Vision nationale 2030 » du Qatar », expliquent nos experts locaux du département des Risques pour la région du Moyen-Orient. « Pour atteindre les objectifs de ce projet, la grande majorité de l'argent investi depuis 2010 a été consacrée aux transports, aux hôtels et à d'autres infrastructures importantes. »

La motivation derrière cette vision nationale est claire. La richesse du Qatar repose sur le gaz naturel et le pétrole. Comme d'autres économies dépendantes des hydrocarbures, le pays souhaite se diversifier.

La Coupe du monde et les dépenses d'infrastructure qui y sont associées font partie intégrante de cet objectif de diversification. La détermination du Qatar à créer une économie plus équilibrée ouvre des opportunités commerciales dans un large éventail de domaines.

 

Une opportunité pour tous les secteurs d'activité

Le gagnant le plus évident de la Coupe du monde 2022 - après l'équipe qui soulèvera le trophée - sera le secteur du tourisme Qatari. Les campagnes de marketing mondiales axées sur le tournoi ont déjà fortement promu le pays en tant que destination touristique.

Fitch prévoit que le nombre total d'arrivées de touristes atteindra 3,5 millions d'ici fin 2026, contre 2,9 millions en 2016.

La Coupe du monde sera suivie de la Coupe d'Asie en 2023 et des Championnats du monde de natation en 2024, chacun apportant des visiteurs et un pic de publicité positive.

Mais, le tourisme est loin d'être le seul secteur qui bénéficiera de la nouvelle stratégie économique du Qatar.

Les revenus élevés et croissants au Qatar offrent des opportunités importantes dans les secteurs de l'alimentation, des boissons et de la vente au détail d'épicerie. Les marques premium et saines sont particulièrement bien accueillies. Les aliments prêts à consommer sont également un secteur de plus en plus important pour les jeunes Qataris et les visiteurs.

Même si les dépenses d'infrastructure vont diminuer après la Coupe du monde, il y aura toujours des opportunités dans la construction, les machines et l'ingénierie, car le Qatar continue de construire sa « Vision nationale 2030 ».

Les biens de consommation manufacturés, les produits alimentaires et agricoles seront des importations importantes dans un avenir prévisible. Il va sans dire que l'approvisionnement de l'industrie pétrolière et gazière offrira encore des possibilités d'investissement importantes pendant quelques années.

 

Un nouvel accent mis sur la connaissance

La « Vision nationale 2030 » du Qatar a des objectifs plus larges et offre des possibilités au-delà des marchés d'importation traditionnels. La création d'une économie de la connaissance figure en bonne place sur la liste des priorités du gouvernement.

Elle s'articulera autour de la technologie, du design, de la recherche et du développement. Le Qatar veut encourager l'esprit d'entreprise dans un certain nombre de domaines. En outre, il entend rivaliser avec Bahreïn et les Émirats Arabes Unis en tant que centre financier régional.

« La croissance d'une économie de la connaissance est susceptible de se produire de manière similaire aux changements qui ont lieu aux EAU et en Arabie saoudite, par la commercialisation de la recherche et du développement en partenariat avec le secteur privé », soulignent nos experts locaux du département des Risques pour la région du Moyen-Orient. « Cela peut offrir des opportunités pour les investissements étrangers ».

L'ambition du pays dans ce domaine est déjà visible dans des développements tels que le bâtiment M7 récemment achevé dans le centre-ville de Doha. Cette construction futuriste de cinq étages est décrite comme un « épicentre de l'innovation et de l'entrepreneuriat dans le domaine du design, de la mode et de la technologie. »

 

Les affaires au Qatar : des bases solides pour les investissements étrangers

La stratégie économique du Qatar est fixée, mais dans quelle mesure le pays est-il accueillant pour les entreprises et les investissements étrangers ?

Avec une vision globale, des zones de libre-échange bien établies et une volonté de se diversifier et de ne plus dépendre excessivement du pétrole et du gaz, il existe des opportunités évidentes pour le commerce extérieur.

Les matières premières, les produits finis et les services professionnels sont tous demandés dans ce riche État du Golfe - et les investissements étrangers sont généralement appréciés. Les droits d'importation sur la plupart des marchandises sont de 5%. Ce taux peut toutefois atteindre 20% ou plus lorsque les importations entrent en concurrence avec certains produits fabriqués localement.

« D'une manière générale, le Qatar dispose de toutes les bases nécessaires à la réussite des affaires, avec des revenus moyens élevés, un faible risque de crédit et une stabilité politique à long terme », selon nos experts locaux. « L'organisation réussie de la Coupe du monde 2022 a renforcé la réputation de fiabilité du pays. »

Si les dirigeants du pays savent que la diversification est la clé d'un avenir prospère, ils disposent également de ressources nationales massives (notamment de gaz naturel) pour financer des initiatives clés à court et moyen terme.

 

Les défis à relever pour faire des affaires au Qatar

Néanmoins, les entreprises étrangères doivent être conscientes des défis que pose le commerce avec le Qatar.

Si la population est prospère, elle est aussi relativement peu nombreuse. Avec environ 2,7 millions d'habitants, de nombreuses entreprises considèrent le Qatar comme une passerelle vers la région du Golfe au sens large.

La région est volatile et la dépendance actuelle du Qatar vis-à-vis des exportations de gaz, bien que très rentable, laisse son économie dépendante des aléas économiques mondiaux.

Les investisseurs bénéficieront de la diversification et de la libéralisation progressive de l'économie Qatarie, mais certains secteurs restent interdits aux capitaux étrangers ou sont monopolisés par des entreprises publiques.

La culture d'entreprise pose également des problèmes spécifiques. « Par exemple, il peut être difficile d’accéder aux informations financières concernant des sociétés privées Qataries », selon nos experts locaux. « Seules les sociétés cotées en bourse sont obligées de publier des états financiers, il est donc essentiel d'établir de solides relations professionnelles si vous traitez avec des sociétés non cotées ». Faire des affaires au Qatar nécessite généralement un sponsor local, ce qui demande du temps et de la persévérance.

Pour cette raison, les entreprises commerçant avec le Qatar doivent suivre les meilleures pratiques en matière de crédit management. Établissez des relations de confiance solides, évaluez la solvabilité des clients et partenaires B2B, et fixez des limites et des conditions réalistes. Signez les contrats avant d'entreprendre des travaux.

En outre, veillez à ce que les contrats soient clairement rédigés et établissez dès le départ des politiques solides de recouvrement des créances.

Il faut savoir que, comme la plupart des États du Golfe, le Qatar dispose d'un droit du travail spécifique (le système de la kafala). Ce système exige que tous les travailleurs migrants (travaillant principalement dans les secteurs de la construction et des services domestiques) aient un parrain dans le pays, généralement leur employeur, qui est responsable de leur visa et de leur statut juridique. Cette pratique a été critiquée par les organisations de défense des droits de l'homme car elle crée des possibilités d'exploitation des travailleurs.

Le Qatar a adopté certaines réformes globales du système de kafala avant la Coupe du monde, mais des critiques persistent quant au fait que les efforts de réforme devraient être plus étendus et mieux appliqués. Par conséquent, les entreprises étrangères qui commercent avec des sociétés qataries pratiquant le système de kafala pourraient être confrontées à des problèmes de réputation.

La culture d'entreprise pose également des problèmes spécifiques. Par exemple, il peut être difficile d'obtenir des informations financières sur les entreprises privées qataries. Seules les sociétés cotées en bourse sont tenues de publier leurs états financiers. Il est donc essentiel d'établir des relations professionnelles lorsqu'on traite avec des sociétés non cotées. Pour faire des affaires au Qatar, il faut généralement un sponsor local, ce qui demande du temps et de la persévérance. Il est recommandé de rédiger des contrats clairs et d'établir dès le départ de solides politiques de recouvrement des créances.

La Coupe du monde et la « Vision nationale 2030 » ont montré que le Qatar est ouvert aux affaires. Les opportunités abondent dans un État à revenu élevé qui s'oriente vers la diversification et la libéralisation de son économie. Mais les entreprises étrangères qui souhaitent investir au Qatar doivent être conscientes des nuances de culture et des traditions commerciales.